Grève à la Commission: Faits et arguments

Déclaration faite par R&D, Conf. SFE, CISL, SFIE, SE, FFPE, RS U4U/USHU

La diffusion à la Commission de tracts et de messages par certains syndicats, concernant la grève du 8 novembre prochain, parfois confus ou induisant en erreur, a suscité nombre croissant de questions de la part des collègues.

Le recours à la grève est pour nous une décision trop importante pour qu'elle soit prise à la légère, dans la précipitation. Afin de sauvegarder l’unité syndicale et éviter des polémiques nuisibles, nous nous sommes jusque là abstenus de diffuser des messages. Néanmoins, face à la confusion grandissante et aux interrogations légitimes que le personnel nous adresse, nous tenons à faire toute la clarté en répondant aux questions soulevées.

Qui diffuse les messages d'appel à la grève à la Commission?

Les messages à la Commission de Bruxelles d'appel à la grève du 8 novembre proviennent seulement de trois syndicats: US, PLUS (TAO et Save Europe), Génération 2004.

Ces trois syndicats ont appelé à la grève, pour relayer la grève du 8 novembre au Conseil votée suite à deux AG, alors qu'à la Commission aucune AG n'a décidé d'une grève pour le 8 novembre.

Plusieurs syndicats – R&D, Solidarité européenne, Conf. SFE, CISL FFPE, U4U et USHU / RS - ne se sont pas prononcé pour cette grève, l'estimant peu préparée, confuse dans ses objectifs, insuffisamment relayée dans d'autres institutions.

Nos syndicats sont favorables à une grève générale unitaire et interinstitutionnelle de la Fonction publique européenne.

Cependant, ils veulent mieux cibler les objectifs de l'action du personnel, l'élargir au niveau interinstitutionnel et dans tous les lieux de travail compte tenu des éléments suivants:
- la rencontre avec le vice président de la Commission en charge du dossier réforme pour vérifier et analyser la stratégie de notre institution;
- la rencontre du 7 novembre prochain au Parlement européen, permettant aussi de faire le point avec les autorités de cette institution, pour coordonner les démarches afin de résister aux attaques du Conseil et pour s'assurer du soutien de cette institution;
- l'analyse du document préparatoire de la présidence chypriote pour le Conseil des 22/23 novembre prochain sur les perspectives financières. Si les économies proposées – plus de 50 milliards – concernaient de manière linéaire toutes les rubriques, cela se traduirait par une baisse de la rubrique 5 (donc de la masse salariale), se situant alors à environ 3,5 milliards d'euros.

S'agit-il là d'une grève interinstitutionnelle réunissant toutes les institutions ?

Non! Lors de son Assemblée Générale du 15 octobre dernier, le personnel du Conseil a décidé de lancer une grève d'avertissement contre le Conseil.

Par la suite, seules certaines OSP de la Commission (voir plus haut) ont décidé de se joindre à cette action en lançant une grève dont les objectifs ne sont toujours pas clairs.

Il en est de même dans tous les lieux d'affectation et autres institutions où la grève du 8 novembre prochain ne fait pas l'objet d'un accord intersyndical. La plupart des représentants du personnel de toutes les autres institutions ont partagé notre analyse sur l'absence de coordination interinstitutionnelle. Il s'agit en effet d'une grève lancée sans véritable coordination, dans la division syndicale, de manière confuse et dans la précipitation.

De plus, son lancement à Bruxelles s'est fait le jour précédant une semaine de congés!

Ne faut-il pas être solidaire avec les collègues du Conseil qui feront grève le 8 novembre prochain?

Dans la résolution votée par l'AG au Conseil le personnel a demandé aux autres institutions d’être solidaires. Nous sommes solidaires de leur grève et nous comptons lui donner la réponse la plus adéquate sans pour autant contribuer à l'affaiblissement du mouvement en se lançant avec précipitation dans une grève très minoritaire.

Dans ce sens, nous proposons deux initiatives:
• En coordination avec les OSP de toutes les institutions, nous lançons sans délai un appel pour la mise en place d'un fonds de solidarité en demandant à tous les collègues de toutes les institutions et agences de soutenir par une contribution financière les collègues du Conseil à l'occasion de la grève du 8 novembre mais aussi lors de toutes les mobilisations futures qui seront nécessaires.
• Nous convoquons un rassemblement du personnel gréviste ou non le 8 novembre 2012 au Berlaymont, que nous souhaitons le plus massif et le plus unitaire possible.

A la lecture des messages diffusés par les syndicats qui soutiennent la grève, on ne peut pas comprendre exactement quelles sont les finalités? La solidarité avec le personnel du Conseil? La volonté de combattre les attaques du Conseil? Une action aussi contre la Commission ou pour la soutenir?

La seule explication à la précipitation est de respecter la date du 8 novembre, à savoir la grève au Conseil, et donc de manifester la solidarité avec ces collègues. Comme indiqué ci-dessus nous partageons pleinement cet objectif, mais nous pensons qu'il est mal desservi par des démarches confuses lancées dans l'isolement et la division. Bien d'autres démarches peuvent à ce stade mieux servir l'objectif commun.

De plus, la date choisie ne permettait ni une analyse claire de la nouvelle situation politique ni ne donnait le temps nécessaire pour coordonner une action réellement unitaire et interinstitutionnelle. Force est de constater que tel n'est pas l'objectif des organisations syndicales qui appellent à la grève à la Commission.

Enfin, les initiateurs de cette grève ont déclaré, lors de la rencontre du 30 octobre avec le Vice président de la Commission, vouloir soutenir l'action de la Commission. On peut remarquer que ni celle-ci ni le PE ne souhaitent cette grève. Plus grave encore, soutenir l'action de la Commission veut dire soutenir sa proposition et vouloir négocier les coupes supplémentaires au milliard déjà contenu dans la proposition. Or telle n'est pas la position du Front commun à la Commission ni celle de sa dernière AG générale unitaire.

Excluez-vous le besoin de faire grève aussi à l'avenir au sein de la Commission et des autres institutions et agences ?

Absolument pas! Faisant suite à la dernière Assemblée Générale à la Commission, nous avons signé un préavis de grève à titre conservatoire du 5 au 23 novembre prochains.

Les fossoyeurs des institutions et de notre fonction publique méritent une réponse ferme! La gravité des attaques menées contre notre fonction publique, la position irresponsable de plusieurs EM imposent des réactions sans la moindre ambiguïté.

Néanmoins, le plus grand cadeau qu'on pourrait faire aux ennemis de la fonction publique, c'est une grève ratée, non coordonnée et sans objectifs clairs. Les représentants des EM au Conseil et les médias ne manqueront pas de l'exploiter contre les institutions et leur personnel.

Tout au contraire, une véritable grève interinstitutionnelle coordonnée lancée dans la plus grande unité syndicale serait un message fort dont nous avons besoin.

Faut-il se rendre à l'AG du 5 novembre?

La grève pour le 8 novembre étant lancée, il ne sert à rien de se rendre à une AG minoritaire dont le seul objet est de préparer une action non unitaire.

De plus, en y allant, on prendrait le risque d'accroître des tensions intersyndicales dont le personnel n'a pas besoin.

Nous préférons appeler tout le personnel au Rassemblement du 8 novembre, qu'il soit gréviste ou pas.

Si la grève n'est pas pour le 8 novembre c'est pour quand?

Tel que convenu avec les organisations syndicales des autres institutions, nous allons renforcer les contacts et la coordination en vue de suivre de manière très attentive:
- l'évolution des positions des EM au sein du Conseil,
- les résultats de la rencontre du 30 octobre avec le Vice-président en charge du dossier à la Commission, qui a fait part de la position très ferme du Collège contre les positions du Conseil et les propositions de la présidence chypriote sur les perspectives financières
- celle avec le rapporteur de la commission juridique du PE, le 7 novembre prochain à l’occasion de l'AG du personnel du PE
- celle avec M. Van Rompuy au Conseil le 14 novembre,
- enfin, les propositions de la présidence chypriote sur les perspectives financières,

en organisant une mobilisation croissante et une action véritablement commune en préparation du sommet des 22 et 23 novembre prochains consacré aux MFF.

Plusieurs dates ont été évoquées - le 14 novembre (jours de grève européenne contre l'austérité), le 16 novembre (deuxième jour de grève au Conseil), enfin les 22/23 novembre (jours du Conseil Européen sur les perspectives financières de l'Union) – sans pour autant arrêter une décision.

Au-delà des problèmes graves pour le MFF et pour la négociation Réforme à la Commission, ne faut-il pas réagir au désordre grandissant dans l'organisation des services, des réorganisations plus que bancales comme celle de la DG EMPLOI, l’externalisation confuse dans le secteur recherche, l'absence de suivi concret des engagements pris lors de la négociation Réforme pour les collègues post 2004 et les AC...?

Oui et avec fermeté! Nous avons d'ailleurs fait état de ces problèmes lors de la rencontre avec le vice-président Sefcovic du 30 octobre et pris acte de ses engagements. Il faut dépasser le stade des promesses et des engagements vagues en offrant des garanties précises et un planning clair pour la mise en œuvre des mesures convenues, par exemple les concours internes pour les collègues post 2004.

Dans cette phase politique critique, l'institution doit tout faire pour renforcer la confiance de son personnel,son premier allié.

Dans ce contexte, tout doit être fait pour reconstituer une véritable unité du personnel en essayant de remédier aux désastres de la Réforme 2004!

En ne vous associant pas à la grève du 8 novembre, n'êtes vous pas en train de soutenir la Réforme et donc aussi la réduction des effectifs, les mesures inacceptables concernant les AST, les futurs collègues secrétaires?

Ce qui est sur la table du Conseil à ce stade sont les MFF et non pas le projet de Réforme du Statut sur lequel la négociation entre le Conseil et le PE n'a même pas commencé.

Les deux dossiers sont certes liés mais uniquement en termes budgétaires, dans la mesure où la fixation de l'enveloppe budgétaire pour les frais administratifs a aussi un impact indirect sur les dépenses liées au personnel.

Nous pensons néanmoins que dans la négociation en cours, la Commission s'affaiblit en diminuant déjà ses effectifs au-delà des 5% en 5 ans prévus dans la réforme.

C'est pourquoi nous lui demandons de stopper ces réductions. Enfin, la question se pose du retrait de la proposition de réforme de la Commission:
- si celle-ci était aggravée par le Conseil
- ou bien si le Conseil persistait à n'envisager la question des économies à réaliser qu'à travers le débat sur les perspectives financières.

Nos syndicats, malgré les progrès obtenus dans le cadre des négociations, par exemple sur le dossier de la précarité, ne soutiennent pas cette réforme, surtout parce qu'elle ne réduit pas les disparités croissantes au sein de l'institution. Nous remarquons que malgré des mesures totalement inacceptables pour les fins de carrière des AST, pour les futures secrétaires, etc... celle-ci ne dégrade pas les "fondamentaux" de nos carrières et pensions, ce qui dans le contexte politique actuel est appréciable. Le redressement des disparités créées par la réforme 2004 reste néanmoins d’actualité : il impose d'urgence des mesures supplémentaires de gestion et d’organisation.

Dans les messages appelant à la grève il est toujours fait référence au Conseil, mais jamais au rôle du PE qui est pourtant essentiel tant pour les MFF que pour la Réforme de notre statut (codécision entre Conseil et PE).

Effectivement on a parfois l'impression d'une certaine nostalgie pour la négociation de la Réforme 2004, époque où le Conseil était seul à décider.

Fort heureusement, pour la réforme en cours, le rôle du PE a été jusque-là essentiel pour soutenir notre institution, freiner les ardeurs du Conseil et assurer une défense efficace de notre fonction publique.

Si la grève du 8 novembre prochain n'est pas lancée au niveau de toutes les institutions, est-elle pour le moins organisée dans les institutions concernées par le trilogue devant décider de la Réforme et donc aussi au PE?

Non ! Les autorités du PE, qui jusqu'ici ont soutenu de manière très résolue notre fonction publique, partagent les craintes du Vice-président Sefcovic sur les dangers de cette grève à ce stade et de ses effets pervers sur la suite des négociations.

Le Front Commun du PE, qui partage notre analyse sur la grève du 8 novembre, avait déjà décidé d’une AG le 7 novembre pour faire le point sur les dossiers Réforme et MFF. Les collègues de la Commission y sont invités. Nous allons naturellement tenir le personnel informé des résultats de cette AG.

Par votre attitude n'êtes-vous pas en train de casser la grève et l'unité syndicale et d'action de toutes les institutions dans une phase si critique pour notre fonction publique?

Cette question pourrait être utilement posée aux syndicats à la source de cet appel à la grève le 8 novembre à la Commission, lancé de manière confuse sans la moindre coordination ou suivi au sein des autres institutions.

Pour notre part, nous avons donné une contribution essentielle à la mise en place du Front Commun dans toutes les institutions. Notre engagement en faveur de l'unité syndicale n'est plus à démontrer.

C'est justement pour nous opposer à la division à laquelle cette action est en train de nous conduire, que nous avons attendu jusqu’au dernier moment pour communiquer notre position et que nous continuons à faire tout ce qui est en notre pouvoir pour reconstituer l'unité autour d'actions communes, réfléchies et bien coordonnées.

Les élections pour le comité du personnel du Conseil prévues du 7 au 11 novembre prochain ont-elles pu avoir un quelconque impact sur la volonté de visibilité et sur la décision de certaines OSP de la Commission de lancer cette grève ?

No comment...

Y a t'il encore une chance d'éviter la division à l'occasion du 8 novembre pour continuer à avancer dans l'unité syndicale avec un véritable Front Commun?

Nous l'espérons vivement. Jusqu'à la dernière minute, nous continuerons à essayer de persuader les OSP à la source de cette action de grève du caractère très dangereux de leur démarche, dépourvue de toute planification et coordination avec les autres institutions. Elle risque avant tout d'affaiblir et de diluer l'action de nos collègues du Conseil.

Quoi qu’il en soit, après le 8 novembre, nous allons renforcer nos efforts et continuer à faire tout ce qui est possible pour renforcer l’unité d’action des représentants du personnel de toutes les institutions, en coordonnant nos efforts avec les forces qui veulent défendre la fonction publique européenne et l’action de nos institutions.

English version coming soon

05/11/2012